- Posted by Chirayil Thomas
- On novembre 23, 2015
- 0 Comments
Homélie du Nonce Apostolique, Mgr. Luigi Bonazzi
Drummondville, 15 novembre 2015
Chers frères et sœurs,
Chers amis,
Nous sommes ici réunis, les autorités civiles et religieuses, fidèles et citoyens, pour célébrer ensemble et vivre dans la joie cet honneur que le Pape François a fait à votre magnifique et glorieuse église de Saint-Frédéric ici à Drummondville, en lui accordant le titre de Basilique mineure. Il s’agit d’une distinction que dans le diocèse de Nicolet aucune autre église, ni même votre Église Cathédral, a reçu. Une distinction qui honore votre ville prospère et dynamique de Drummondville, qui célèbre cette année le 200e Anniversaire de sa fondation.
À cet égard, a attiré mon attention le choix du thème sous lequel vous êtes en train de vivre les fêtes du 200e Anniversaire de Drummondville: «Les gens heureux ont une histoire”. Vous faites donc une référence à cette dimension fondamentale de l’existence humaine qui est l’histoire, le temps, lequel est toujours une unité inséparable de passé, de présent et de futur. Vivre le temps, vivre l’histoire signifie toujours et inséparablement se mettre dans l’aujourd’hui (le présent), soutenu par ce qui a été vécu et expérimenté hier (le passé), dans la confiance d’être en mesure de préparer un avenir prometteur (le futur). Ce sont précisément ces trois dimensions du temps que le Pape François a voulu rappeler, lorsqu’il a invité à célébrer cette année 2015 comme Année de la Vie Consacrée. Il a invité toute l’Église, et en particulier les Religieux et les Religieuses, à «Regarder le passé avec reconnaissance, Vivre le présent avec passion, Embrasser l’avenir avec espérance “.
Moi aussi, chers citoyens et citoyennes de Drummondville, je vous invite à faire de ce moment de joie, occasionné par l’attribution du titre de Basilique mineure à votre bien-aimée Église de Saint-Frédéric, une opportunité pour “regarder votre passé avec reconnaissance, vivre ce temps présent avec passion, de manière à pouvoir bâtir votre avenir avec espérance “. On a toujours besoin de prendre conscience de la valeur du temps, du don qui est le temps, le premier cadeau que le Seigneur nous donne chaque jour. Il nous donne le temps : encore un jour, un jour de plus …
Qu’est-ce que nous enseigne l’histoire gardée dans les murs de la Basilique mineure de Saint-Frédéric ? Un aspect qui vous connaissez mieux que moi et qui a attiré mon attention, a été celui des sacrifices, du travail héroïque, de l’infatigable persévérance qui ont été nécessaires pour construire cette merveilleuse église. En fait, le bâtiment actuel est le point d’arrivée d’un processus étendu sur quatre étapes. La première église, construite en 1822, a été démoli en 1879 pour en faire une plus grande. Cette deuxième église a été détruite par un incendie en 1899, ce qui a stimulé la construction d’un troisième bâtiment dans les années 1900-1907. Cette troisième église a subi elle-aussi un incendie en 1921. Mais cette tragédie douloureuse ne fit qu’augmenter le zèle et la détermination des fidèles qui en 1922 ont commencé la construction de la quatrième église, le magnifique temple aujourd’hui, bénie en 1930 par Mgr. Brunault, Évêque de Nicolet, puis consacrée en 1947. Quelle constance, quelle endurance et surtout quelle foi et quel travail que peuple !
Chers amis : même si nous ne sommes pas en mesure de les voir avec nos yeux, dans ce moment sont ici avec nous et nous accompagnent les innombrables fidèles et citoyens qui, de manières différentes et dans la solidarité, ont contribué à la construction de cette Basilique Mineure. Nous sommes reçus et soutenus par leurs labeurs, par leur persévérance, et surtout par leur foi qui, à son tour, a soutenu et rendu possible leurs efforts et leur constance.
Cette simple pensée nous fait prendre davantage conscience d’une vérité fondamentale qui, occupés comme nous le sommes dans nos affaires ou problèmes personnels, et plongés comme nous le sommes dans une société individualiste et consumérisme, souvent nous oublions et même ignorons : nous avons besoin des autres, chacun de nous a besoin de l’autre, chacun de nous vit, fait son chemin … soutenu par le travail et les œuvres de ceux qui nous ont précédés. On marche toujours en tant que peuple, et on progresse dans la mesure où nous sommes bien connectés les uns aux autres.
Sommes-nous toujours capables de marcher ensemble ? De marcher ensemble en tant que citoyens, en tant que croyants ? Un test que tout bon Drummonvillois et Drummondvilloise pourrait appliquer à soi-même pour tester sa capacité de vivre non pas comme un solitaire, mais comme un membre vivant de ce corps vivant qui est la ville de Drummondville, pourrait inclure par exemple les questions suivantes : est-ce-que tu te sent impliqué dans les événements heureux et tristes, dans les succès ou dans les lacunes de cette ville ou les considère-tu étrangers à toi? Pense-tu qu’il est juste de dépenser ton temps pour t’engager à rendre la ville meilleure ? Je l’espère, je crois que chacun et chacune de vous fait de son mieux pour réussir avec brio ce test de maturité civique.
Mais il-y-a un enseignement encore plus profond que cette église de Saint-Frédéric, décorée avec le titre de Basilique mineure, veut nous délivrer. C’est l’enseignement qui nous vient de la Parole de Dieu que nous avons entendu et avec laquelle nous voulons nourrir notre vie chrétienne.
Un premier enseignement. Comme le temple objet de la vision du prophète Ézéchiel, cette Basilique mineure elle est aussi une église source d’eau vive. En effet, elle contient Celui qui est en mesure de désaltérer toute soif, le Seigneur Jésus qui a dit : «celui qui boira de l’eau que moi je lui donnerai n’aura plus jamais soif ; et l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau jaillissant pour la vie éternelle» (Jn 4,14).
Pourquoi, alors, quand nous avons soif, quand nous avons besoin d’être compris et personne ne nous comprend, d’être aimés et il nous semble que personne ne nous aime, pourquoi ne venons-nous pas à l’église, où nous sommes toujours attendus par Celui qui ne nous demande pas de prendre un rendez-vous pour le rencontrer ? Viens, nous-dit Jésus qui habite cette Basilique : la porte est ouverte, tu trouveras l’eau dont tu as besoin.
Une seconde leçon importante nous vienne des deux autres lectures de la Parole de Dieu.
Dans sa lettre aux chrétiens d’Éphèse, l’apôtre Paul nous prend par la main et nous explique que le bâtiment d’une église, comme celui-ci de votre belle Basilique mineure, est en fait une image de cette construction faite de « pierres vivantes » (cfr. 1Pt 2,5) qui est la «famille des enfants de Dieu” dont nous sommes tous appelés à être membres. “Vous n’êtes plus des étrangers – nous rappelle saint Paul – ni des gens de passage … vous êtes membres de la famille de Dieu” (Eph 2,19). Cette famille des enfants de Dieu s’appuie sur une pierre angulaire qui est le Jésus-Crist-lui-même. Et se tournant vers Jésus, au nom aussi de nous tous, l’apôtre Pierre proclame : «Tu es le Christ (c’est à dire le Messie, le Sauveur) le Fils du Dieu vivant”. Oui, Jésus est notre sauveur, il nous sauve, il nous libère, il nous donne la vie.
Maintenant il y a un autre point important qui – grâce à la foi – doit illuminer et enrichir notre vie. Si Jésus est la «pierre angulaire», en Jésus et par Jésus chacun de nous devienne une pierre vivante, une pierre angulaire. En effet, Jésus a rejoint chacun de nous, il a donné sa vie pour chacun de nous, de sorte que chacun de nous lui appartient. Cette identification de Jésus avec chacun de nous est si profonde que le Seigneur Lui-même dit dans l’Évangile : n’importe quelle chose « que vous avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40). Cet homme, cette femme, cet enfant ils sont mon frère, ma sœur. Si chacun de nous devienne capable de reconnaitre l’image de Dieu dans son prochain, croyez-vous qu’il y aurait encore tant de souffrances, de destruction et de mort, comme celles que – par exemple – nous avons tragiquement vu ce vendredi dernier à Paris ?
C’est ainsi que cette église, la Basilique mineure de Saint-Frédéric, devient une invitation à construire l’”église vivante” entre nous. Une invitation à reconnaître dans chaque frère et sœur une “pierre vivante” avec lesquels nous sommes appelés à construire l’”Église vivante”, la famille des enfants de Dieu. Pas pour rien Jésus, notre Maître, nous a appris deux choses qui sont essentiellement une : n’avoir qu’un seul Père – le nôtre Père qui est aux cieux – et à être frères et sœurs les uns des autres.
Si vous êtes une famille, si – grâce à Jésus – vous devenez capables de reconnaitre dans chaque prochain un frère ou une sœur à aimer, et si effectivement vous vivez cette amour comme un service, alors vous êtes vraiment en train de montrer gratitude et reconnaissance à ceux qui vous ont légué cette merveilleuse Basilique minore, vous êtes en train de vivre constructivement le temps présent, et vous êtes en droit de vous tourner vers l’avenir avec espérance. Votre histoire fera de vous des gens heureux. AMEN