- Posted by Chirayil Thomas
- On septembre 19, 2017
- 0 Comments
Mémoire de la Bienheureuse Elisabeth Turgeon
150e Anniversaire de la Fondation du Diocèse de Rimouski
Homélie du Nonce Apostolique Mgr Luigi Bonazzi
17 août 2017
Cher Archevêque Denis Grondin,
Chères Sœurs de Notre Dame du Saint-Rosaire
Chers prêtres, diacres, religieux et religieuses
Chers frères et sœurs dans le Christ:
Nous sommes rassemblés ici dans cette belle chapelle des Sœurs du Saint Rosaire, le jour de la mémoire de la Bienheureuse Elisabeth Turgeon, pour célébrer et remercier le Seigneur pour le 150e anniversaire de la fondation du diocèse, maintenant archidiocèse, par le Bienheureux Pape Pie IX. En tant que Représentant du Saint-Père au Canada – votre grand, cosmopolite et accueillant pays – je désire d’abord vous apporter, à votre Pasteur, Mgr Grondin, à vos prêtres et aux diacres permanents, aux religieux et religieuses, à vous tous, chers frères et sœurs dans le Seigneur, les félicitations les plus chaleureuses, le salut fraternel, la prière, l’encouragement et la bénédiction du pape François.
1. Je pense que si le pape François était avec nous aujourd’hui, en ce jour de la Mémoire de la Bienheureuse Elisabeth Turgeon, le jour où nous célébrons le 150e anniversaire de votre bien-aimé Archidiocèse, il vous exhorterait, précisément et surtout, à vivre un moment profond de « mémoire ». Il est important de “faire mémoire”, d’être « nourris par ses racines », de jamais oublier la mémoire de ce que le bon Dieu a fait pour chacun et chacune de nous. Notre histoire personnelle se fonde dans le souvenir de tout ce que le Seigneur a fait pour nous. Se souvenir est essentiel pour la foi, comme l’eau pour une plante : de même qu’une plante sans eau ne peut rester en vie et donner du fruit, de même la foi, si elle ne se désaltère pas à la mémoire de tout ce que le Seigneur a fait pour nous.
« La mémoire – nous dit notre cher Papa François – est importante, car elle nous permet de demeurer dans l’amour, de se souvenir, c’est-à-dire de porter dans le cœur, de ne pas oublier celui qui nous aime et que nous sommes appelés à aimer. Cependant – come il est important cet avertissement du Papa François! – cette faculté unique que le Seigneur nous a donnée est de nos jours plutôt affaiblie. Dans la frénésie dans laquelle nous sommes plongés, beaucoup de personnes et beaucoup de faits semblent glisser sur nous. On tourne les pages rapidement, avides de nouveautés mais pauvres en souvenirs. Ainsi, brulant les souvenirs et vivant dans l’instant, on risque de rester à la surface, dans le flux des choses qui se succèdent, sans aller en profondeur, sans cette épaisseur qui nous rappelle qui nous sommes et où nous allons. Alors, la vie extérieure devient morcelée, la vie intérieure, inerte » (Homélie de Pape François à la Messe du Corpus Domini, 18 giugno 2017).
Quand on est sur la route, ici au Québec, on a toujours sous le yeux la plaque d’une voiture avec l’inscription « Je me souviens ». Se souvenir de quoi? De beaucoup de choses, surement, mais surtout et avant tout : « Souviens-toi de Jésus-Christ » (2Tm 2,8). Faire mémoire. Chaque jour faire mémoire, se souvenir de l’Amour de Dieu qui nous précède. « Je me souviens ».
2. Le jour de de la Mémoire de la Bienheureuse Elisabeth Turgeon nous sommes invités à une « mémoire spéciale » : celle de son « charisme de tendresse ». Bien en syntonie avec votre bienheureuse Fondatrice, le Pape François vous appelle – chères Sœurs du Sainte Rosaire – à promouvoir la « révolution de la tendresse » : « C’est l’amour qui se rapproche et se concrétise. C’est un mouvement qui part du cœur et arrive aux yeux, aux oreilles et aux mains. La tendresse nous demande de nous servir de nos yeux pour voir l’autre, de nos oreilles pour l’écouter, pour écouter les enfants, les pauvres, ceux qui ont peur de l’avenir…La tendresse nous demande de nous servir de nos mains et de notre cœur pour réconforter l’autre, pour prendre soin de ceux dans le besoin ». (cfr. Message vidéo du pape François à TED 2017 ».
3. Mais de quoi un Diocese doit faire mémoire ? Nous trouvons la réponse en observant attentivement cet « organisme vivant » qui est un diocèse et en nous demandant : « Qu’est-ce qu’un diocèse? Quelle est l’identité et la mission d’un diocèse ? »
A cette question nous pouvons donner la réponse théologique et juridique que nous trouvons dans un si grand nombre de documents du magistère de l’Église. Le Concile Vatican II, puis repris par le Code de droit canonique, enseigne que “Le diocèse est la portion du peuple de Dieu confiée à un Évêque pour qu’il en soit, avec la coopération du presbyterium, le pasteur, de sorte que dans l’adhésion à son pasteur et rassemblée par lui dans l’Esprit Saint par le moyen de l’Évangile et de l’Eucharistie, elle constitue une Église particulière dans laquelle se trouve vraiment présente et agissante l’Église du Christ, une, sainte, catholique et apostolique” (CD11; CCC. 369).
Le diocèse est donc l’Eglise du Christ qui vit et œuvre dans un territoire donné. Cette définition théologique-juridique pourrait nous conduire à de nombreuses explications et approfondissements, qui pourtant ne sont pas propres d’une homélie. Je me permets, cependant, de la commenter avec une description plus pastorale-spirituelle, faite par le Pape Benoît XVI dans son précieux livre intitulé « Lumière du monde ». Il décrit l’Eglise de cette façon : « Nous ne sommes pas un centre de production, nous ne sommes pas entreprise qui recherche le profit, nous sommes l’Eglise. C’est-à-dire une communauté d’hommes et de femmes rassemblée dans la foi. Notre tâche n’est pas de fabriquer n’importe quel produit ou d’avoir du succès dans la vente des marchandises. Notre tâche est plutôt de vivre la foi, de la proclamer, et en même temps de maintenir cette communauté de volontaires qui traverse toutes les cultures, qui franchit les nations et les époques, et qui ne repose pas sur des intérêts extérieurs, mais sur une relation intérieure avec le Christ et donc avec Dieu lui-même… » (Benoît XVI, Lumière du monde p.104).
L’Eglise, donc, est toute entière reliée au Christ et au mystère de Dieu. Comme souvent, avec force et affection, nous le rappelle le Pape François : « l’Église n’est pas l’Église des Papes, des évêques, des prêtres et non plus des fidèles, elle est seule et seulement du Christ. Seul celui qui vit dans le Christ promeut et défend l’Église avec la sainteté de sa vie, à l’exemple de Pierre et de Paul. » (Homélie du 29 juin 2015).
Précisément parce que l’Église croit que le Christ, son Seigneur et Maître, est « la clé, le centre et la fin de toute histoire humaine » (GS 10), l’Eglise – et le diocèse comme église locale – trouve sa propre vocation et mission précisément dans l’engagement quotidien à aider les hommes à entrer et rester dans une relation profonde avec le Christ et ainsi avec Dieu. De cette mission, aujourd’hui, nous voulons faire mémoire, une mémoire reconnaissante, afin de la poursuivre avec un zèle renouvelé et audacieux.
Si vous me demandiez de mettre en un mot la tâche que, comme fruit de la célébration de son 150e de Fondation, le Diocèse de Rimouski dans son ensemble et chaque fidèle selon les dons reçus, est appelé à assumer avec ardeur renouvelée, je vous dirais : « être des serviteurs de l’Evangile » (Phil 2:22), dans la conviction que annoncer Jésus, crucifié et ressuscité, est le don le plus grand, qui, avec l’aide de la grâce, un être humain peut faire pour son prochain. En fait, Jésus nous montre le visage de Dieu et proclame la bonne nouvelle que nous avons été rachetés du péché et appelés à être vraiment les fils de Dieu (cfr. 1 Jn 3,1). Mais, en même temps, le Verbe fait homme nous révèle à nous-mêmes, en nous aidant à comprendre qui nous sommes, d’où nous venons et où nous allons. Sans Lui notre identité profonde et notre destin ultime restent une énigme indéchiffrable.
Alors que nous célébrons un nouvel Anniversaire de sa Fondation, puisse l’Église de Rimouski, à travers ses paroisses, ses communautés et ses organisations, toujours mieux se présenter comme une Église « servante de l’Evangile », comme un véritable « oasis de miséricorde », une oasis où Jésus-Christ est annoncé et rencontré, Lui qui est le visage de la Miséricorde du Père, une oasis où à tous, « croyants ou loin de la foi puisse parvenir le baume de la miséricorde comme signe du Règne de Dieu déjà présent au milieu de nous » (Misericordiae Vultus 5). Amen